Conduire une DS en 2008
MAJ DU 22 AVRIL 2006:
Décidément on va dire que je le fais exprès, mais pourquoi ne pas profiter d'un si beau soleil, rare en Haute-Vienne (climat proche de l'Islande), pour ne pas se pencher sur le remontage des ailes, la mise au point du réservoir d'essence, dont le tube plongeur ne va pas jusqu'au bout, et en profiter pour la faire rouler un peu, avant de démonter l'intérieur pour mesurer la corrosion du plancher...
Et bien NON! Ce serait trop beau, trop simple, des picotements dans les jambes, une douleur insupportable au creux des reins...NON JE NE SUIS PAS EN TRAIN DE ME FAIRE BESOGNER PAR MON VOISIN DE CELLULE! C'est juste une vilaine sciatique qui m'empêche de faire le moindre mouvement... Bon trêve de blabla, je vais mettre à jour cette petite rubrique, car si les kilomètres augmentent, mon avis sur la conduite de cet OVNI change également.
Comme je n'ai pas trop le temps de revoir certaines choses sur la DS, je vais en profiter pour vous raconter ce qu'est son usage au quotidien...Comment ça roule c'te bête là?
La DS D....routante?
Premier constat lorsque l'on s'installe dans une DS, c'est bien entendu le confort, les sièges dans lesquels mon corps sculpté d'athlète s'enfonce, la moquette moelleuse à souhait... Puis l'on s'interroge dans un second temps... Comment tant de mollesse peut-elle faire croire à une quelconque efficacité routière? On serait tenter de penser aux nombreuses DS qui se sont brillament illustrées en compétition, mais là, le doute qui vous habite m'habite aussi.
Comme il faut bien commencer, il s'agit de repérer les commandes. Déjà la pédale de frein qui n'en est pas une, c'est un gros champignon, dont la course est du genre « on/off ». Le sélecteur de vitesse, avec sa longue tige chromée est idéalement placé derrière le volant, surtout quand on a de grandes mains...mais nous verrons cela plus tard. Les portières dont les vitres sans encadrement, étonnent et détonnent, des montants dont la finesse donne une visibilité périphérique, mais aussi la vague impression qu'en cas de choc, et bien.... oh et puis on s'en fiche, nous sommes dans les années 60-70, on ne pense pas aux lendemains qui annoncent trop de chagrins, la vitesse est aussi libre que l'amour, la ceinture... quelle ceinture?
D....marrage
La DS ne fait rien comme les autres, donc acte, on tourne la clé de contact, un énorme voyant rouge s'illumine, ainsi que celui de pression hydraulique et d'huile, tous deux rouges, ainsi que celui de charge, orange pour sa part. Pour démarrer, il s'agit de pousser légèrement le levier vers la gauche et là normalement, elle démarre. L'avant se dresse, puis l'arrière, puis etc, etc, ce protocole n'est pas toujours le même, il existe des DS qui se lèvent des 4 roues en même temps. Le frein à main n'est pas à main mais à pied et actionné par une pédale (système toujours utilisé par Mercedes et par la défunte XM), un levier permet de le débloquer dans un gros CHKLONG. Une pichenette sur le sélecteur de vitesse, vers le pare-brise, la première est engagée.
D.....testable
A vrai dire au début, c'est le grand doute... une fois la première passée (KLONG métallique), la voiture décolle, puis l'on dois passer la 2nde.... Vraaaaoummm klong pshiiiit et merde*.
(*) Vraaaaoummm: (ne pas oublier de soulager l'accélérateur, sinon voilà le résultat)
Klong: son du sélecteur
Pshiiiit: très bref, son venant de l'hydraulique lorsque l'on passe un rapport, qui elle bosse, pendant que feignasses que vous êtes, êtes assis dans les moelleux fauteuils de cette fille de Vème république.
Et merde: juron usuel signifiant ma contrariété, parfois remplacé par nom de dieu de putain de bordel de merde, qui est beaucoup plus long.
La direction fait entendre son pfuiiit pfuiiit à chaque légère action sur le volant, tandis que les suspensions, bercent mollement, et font dégobiller les passagers. La direction est assistée, surtout à vitesse normale. A l'arrêt, l'assistance est un peu faiblarde, et la direction s'avère très lourde.
Puis vient le moment de freiner pour la première fois.... Heureusement Citroën venait d'équiper depuis peu, sa DS de ceintures trois points à l'avant, dont le système de bouclage-débouclage-rangement, me laisse encore perplexe. A noter que les sièges arrières n'ont pas de ceintures, de toutes façons les passagers sont déjà morts etouffés par leur vomi. Donc freinage, et croyez moi ça pile très très fort, j'en viens à penser à un malheureux blocage sous la pluie, néanmoins nous allons de ce pas détruire certaines légendes à ce sujet. A noter que ce fameux freinage associé à la suspension permet même si la route est complètement pourrie, de conserver une trajectoire de freinage parfaitement rectiligne, il suffit de lâcher le volant et freiner à fond... elle ne bouge pas.
D.....contracté
Vous l'avez compris, ma première prise en main fût déconcertante, je me suis demandé comment l'on pouvait parler d'efficacité en évoquant la DS encore aujourd'hui 50 ans après sa sortie.... Alors parlons-en.
Une fois le mode d'emploi de base assimilé, cette voiture est un véritable régal pour les amoureux du confort. Les vitesses passent d'une « pichennette » avec la main droite sans que celle-ci ne soit obligée de quitter le volant et ceci de 1ère jusqu'à la 4ème. La suspension absorbe tout, la direction est très précise mais manque de filtration, elle, et n'est absolument pas déroutante comme je peux souvent le lire. Le freinage, je dois encore m'y faire, mais contrairement à une autre légende, la DS ne plonge pas tant que cela au freinage, comme une autruche dans son trou, non, elle corrige très vite, l'arrière se stabilise et freine, ce qui empêche la voiture de plonger. Celles qui plongent c'est un problème soit de freinage arrière insuffisant ou absent (pas de rattrapage automatique à l'arrière), soit des sphères fatiguées.
J'ai oublié de parler du moteur, lui aussi très critiqué pour sa paresse, son bruit, etc.
Là aussi beaucoup de conneries véhiculées par la presse et répétées par les abrutis qui causent sans avoir essayé. Certes le moteur est bruyant, c'est indéniable et c'est son plus gros défaut, par contre le gros 4 cylindres 2.3 n'est absolument pas paresseux, et aime bien prendre les tours, beaucoup plus que certaines voitures actuelles. A partir de 100 km/h, c'est stupéfiant, une fois l'accélérateur au plancher, le deuxième corps du Weber s'ouvre vers 110-120 me semble t-il et elle grimpe sans paresse avec force même jusqu'à 170 km/h (je ne pousse pas plus, les pneus sont morts, je sais bien que ce serait drôle, mais je n'ai pas tellement l'humeur badine en ce-moment pour éclater à 180...). Le seul regret c'est le nombre de rapports qui ne sont que 4 sur la bvh, alors que la bvm en compte 5. Le moteur tourne trop vite, d'où bruit élevé, et consommation en rapport. La souplesse du moteur, fort coupleux, est suffisante pour reprendre en 4ème à 40 km/h, sans que cette vieille demoiselle ne manifeste le moindre hoquet, indigne de son rang.
D...moniaque
La DS cache un deuxième visage. La grosse berline confortable montre maintenant pourquoi elle n'est pas dépassée .
GO!!
Il y a une école qui préfère la boîte mécanique par rapport à l'hydraulique, car la méca est plus prompte au rétrogradage, ce qui en conduite sportive est préférable, sauf si l'on adopte la méthode type du pilote de DS qui consiste à conduire avec les DEUX pieds, un pour le frein, l'autre pour l'accélérateur, rappelons-le la boîte hydraulique étant dépourvue de pédale d'embrayage (non je précise, tout le monde me rétorque le contraire en désignant fièrement du doigt la pédale... du frein de parking. Ahlala. Bon). La position par contre devient très inconfortable, car le bassin est décentré vers la droite, ce qui est douloureux à la longue. Mais cela permet avant un virage de freiner tout en donnant un léger coup d'accélérateur afin de forcer la boîte à rétrograder plus vite.
Bon jusque là en admettant que la procédure décrite ci-dessus se déroule bien, il faut passer le virage...ce qui se passe bien, sauf que l'on n'ose pas au départ rentrer trop vite, car la voiture se couche dans le virage, tandis que le train arrière du fait de sa voie beaucoup plus étroite semble vouloir enrouler plus vite que le train avant. Que nenni et à votre bon coeur m'sieurs dames, petit à petit on peut s'apercevoir que les virages sont avalés à des vitesse que la morale réprouve, ainsi que le coeur des passagers arrières et mes bras qui n'en peuvent plus de s'accrocher au volant, afin que je ne me retrouve pas les fesses côté passager! Il faut ajouter aussi le sous-virage important de la voiture, le moteur est lourd, pour corriger cela il suffit de jouer sur la pression des pneus, on peut même la faire survirer un peu, mais bon ces pressions, je préfère ne pas les mettre, ce n'est pas la philosophie de cette voiture.
Bon autant ceci est amusant pour le chauffeur, autant les passagers ne seront pas tout à fait d'accord sur le côté jouissif des déhanchements osés de l'engin. Il y a quelques années, j'avais 16 ans et pas de sciatique, j'ai effectué Cognac-Royan-Cognac, à fond de train en tant que passager d'une ID20, et vous pouvez me croire....
Pas de ceintures, pas la moindre poignée pour se maintenir, si ce n'est celle de la portière. Les sièges en skaï (les miens sont en cuir je suis très riche), n'offrent absolument aucun maintient latéral, et dans les ronds-points (saloperies), on tente de s'accrocher où l'on peut (éviter si possibles les parties intîmes du chauffeur), et la première pensée est "Putain j'espère que cette frêle portière est bien fermée", car on a vraiment la gueule écrasée contre la vitre. A ce sujet l'inscription "Saint-Gobain" sur ma joue n'est pas un tatouage...
D....esse
Mais le véritable plaisir de conduire de la DS, c'est le juste milieu entre les deux conditions de conduite évoquées ci-dessus. Bien calé dans le fauteuil, la monobranche du volant dans une main, l'autre où vous voulez (surtout si vous avez une jolie passagère), et rouler à vitesse soutenue sans abuser et en toute décontraction. Essayez de reproduire cela avec ses concurrentes de l'époque, 404, 504, R16, on en reparlera. Ces sièges sont parfaits, du moins ma morphologie semble en convenir, et dieu sait à quel pont elle est particulière. Je passe très souvent d'une voiture à une autre, et je passe mon temps à tripatouiller les réglages des sièges, sur la DS je n'y touche jamais c'est parfait.
En conclusion, peut-on dire que la DS est une voiture démodée en 2006. Oui si l'on considère le niveau sonore, le roulis, l'abscence totale de maintient des sièges. Non pour tout le reste! Cette voiture est encore extraordinaire, et c'est pour cela que je l'aime. Elle s'insert dans la circulation actuelle avec bonheur, squatter la file de gauche des autoroutes est parfaitement envisageable. Par contre, ne comptez pas retrouver la suspension de la DS sur une C5. Si le roulis est maîtrisé, la C5 est un tape-cul en comparaison, j'ai en effet l'occasion de rouler souvent en C5 V6...et c'est affligeant. La DS reste donc une voiture exclusive qui conviendra parfaitement aux personnes qui souhaitent rouler.... D...calé.
La relève sera t-elle à la hauteur 50 ans plus tard? Je lui souhaite bonne chance quand-même à cette C6.